Nombre total de pages vues

vendredi 14 février 2014

La Belle et la Bête de Christophe Gans



Après huit ans d'absence et de projets avortés (dont un certain Fantômas), Christophe Gans nous revient avec une nouvelle adaptation de la Belle et la Bête. De la part d'un réalisateur aux films aussi soignés artistiquement que Crying Freeman, Silent Hill, en passant par le Pacte des Loups, on était en droit d'attendre beaucoup de cette nouvelle version. Hélas, la chute n'en a été que plus rude...
 
Que ceci soit bien clair entre nous, Christophe Gans ne démérite absolument pas en ce qui concerne l'aspect visuel. Le réalisateur français prouve, une nouvelle fois, qu'il n'a pas à rougir de certaines productions américaines faites à la va-vite, et dont les effets numériques sont dépassés avant même la sortie. Non, la Belle et la Bête est une véritable réussite plastique. Le film, aux allures de livre d'images, voire de peinture du XVIIIème siècle, fait la part belle aux décors et à la poésie qui s'en dégage. Les effets numériques sont utilisés de manière très pertinente et rares sont les moments où on a l'impression qu'une bonne partie du film a été tourné en fond vert.
 
Seulement voilà, pour ceux qui s'attendraient à une version beaucoup plus sombre du conte, comme pourrait le laisser entendre la filmographie de Gans, vous risquez d'être déçus. Car oui, Christophe Gans signe ici un film tout public, et le problème, c'est que cela se ressent, notamment en ce qui concerne le design de la Bête. Gans aurait pu avoir l'embarras du choix, le conte n'étant pas particulièrement précis quant à la description de la Bête, mais il a finalement opté pour... un lion. Quand on connaît les goûts de Gans en matière d' "aberration", on ne peut qu'être agacé d'avoir une Bête aussi proche des versions de Cocteau et Disney. Mais il n'y a pas que le monstre qui est en cause : tout le film est aseptisé, et ce malgré quelques passages assez explicites, à tel point qu'on en viendrait presque à regretter la version de 1946. On peut donc affirmer que, de ce point de vue là, Christophe Gans a failli à sa réputation.
 
Mais jusqu'ici j'ai critiqué le film par rapport à la vision que je m'en faisais, ce qui n'est pas très objectif, j'en conviens. Revenons donc à ce que le film a à nous offrir. Je l'ai déjà dit, visuellement, le film est magnifique. Mais voilà, il y a aussi un revers à la médaille. Christophe Gans semble, en effet, tellement obnubilé par la forme de son film, qu'il en délaisse complètement le fond. Le fond, c'est tout d'abord l'interprétation. Ceux qui suivent la carrière de Gans savent qu'il n'est pas un éblouissant directeur d'acteurs (il le dit lui-même), mais il a toujours su s'entourer d'interprètes talentueux, ce qui avait pour effet bénéfique de masquer cette imperfection. Alors que penser du choix de Léa Seydoux pour incarner Belle ? Est-ce parce que le grand-père de cette dernière produit le film, ou parce qu'il a vraiment cru en son talent, que Christophe Gans l'a choisie ? Toujours utile que sa prestation n'est guère convaincante. Soit elle est vraiment très mauvaise actrice, soit je n'ai pas du tout été réceptif à son jeu. Le reste du casting est cependant plus en adéquation avec les goûts de Gans. On y retrouve des valeurs sûres comme André Dussollier, ou des acteurs fétiches du réalisateur, tel Vincent Cassel dont chaque apparition est un rayon de soleil dans ce long-métrage. Encore aurait-il fallu lui donner plus de matière à jouer. Car le fond, ce n'est pas seulement les acteurs, c'est aussi le scénario qu'on leur donne à interpréter...
 
L'histoire de la Belle et la Bête, tout le monde la connaît. C'était peut-être l'occasion de proposer une nouvelle lecture, quelque chose d'assez novateur pour justifier une nouvelle adaptation. Malheureusement, en dehors de quelques ajouts, l'histoire n'est guère différente de la version de Cocteau, voire celle de Disney. Mais le pire, c'est que cette fois-ci, la relation entre Belle et le monstre se voit réduite à peau de chagrin. Quelques courtes scènes de dialogues, une petite danse, et hop, voilà nos deux tourtereaux amoureux. Jamais on ne voit Belle apprivoiser la Bête, jamais on ne la voit avoir de l'empathie pour la créature, et jamais la Bête n'a paru être autant au second plan que dans ce film. Car le long-métrage est effectivement centré sur Belle, sur ses promenades dans le chateau, sur son enquête sur le passé de la Bête. La Belle, presque sur tous les plans, toutes les scènes, omniprésente... Comment voulez-vous que j'apprécie un film qui : 1. délaisse la relation entre les deux personnages principaux ; 2. se focalise sur une actrice au jeu duquel je suis de toute évidence allergique ?
 
Bilan : Je l'avoue, je suis complètement resté en dehors du film. D'où mon sentiment d'inachevé lorsque le générique s'est mis à défiler, comme si je n'avais pas vu un film, mais une ébauche de film. Il y a des idées, c'est indéniable. Il y a de bons décors, de bons effets spéciaux, une excellente musique, mais voilà, c'est tout. L'aspect visuel a supplanté l'aspect narratif, rendant ainsi le film, certes, beau, mais complètement désincarné...

1 commentaire:

  1. N'oublies pas que Christophe Gans nous a refilé les droits de Fantomas pour notre prochaine adaptation.
    Concernant la critique en elle-même, on sent véritablement que tu portes dans ton cœur cette chère Léa Seydoux. Je sais qu'elle te rappelle le labrador que tu n'as jamais pu avoir, mais n'en fais pas l'objet de ton amertume passée.
    Au sujet du film maintenant, on sent que Mister Gans a vraiment voulu être au niveau des grosses productions hollywoodiennes et il y parvient finalement. Restes désormais une question psychanalytique à déchiffrer : quelle relation Gans entretient-il avec les lions ?

    L'anonyme qui fait son retour

    RépondreSupprimer