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mardi 26 avril 2011

D'Artagnan de Peter Hyams


Alexandre Dumas n'était pas auteur à s'embarrasser de véracité historique. Mais, dans ce domaine, il a été largement dépassé par les réalisateurs américains qui ont eu pour charge d'adapter son oeuvre la plus célèbre, à savoir les Trois Mousquetaires, sur grand écran. J'en veux pour preuve la partie d'échecs géants totalement surréaliste, entre Louis XIII et le cardinal de Richelieu, dans la version de Richard Lester (comme quoi Harry Potter n'a rien inventé) ou encore la voix-off du tristement célèbre Homme au Masque de Fer de Randall Wallace, toute fière de nous annoncer à la fin du film que "le Roi Louis XIV apporta pain, paix et prospérité à la France" alors que c'est justement l'INVERSE qui s'est produit !!!

Mais rien, oh non, rien n'aurait pu nous préparer à ce monument de débilités qu'est d'Artagnan. C'est bien simple, ce film pourrait être considéré comme un parfait exemple de ce qu'il ne faut pas faire au cinéma ! Voici donc les leçons que Peter Hyams, le réalisateur de ce nanar, aurait dû retenir...

Règle n°1 : Ton générique de début tu soigneras.
Sérieusement, comment peut-on oser proposer un générique pareil à la génération actuelle ? N'importe quel individu possédant un ordinateur et sachant un tant soit peu utiliser le logiciel windows movie maker peut faire exactement la même chose (notamment avec la fonction "postériser") ! Notez également la superbe bourde faite au titre du film lui-même : "D'artagnan" est en effet écrit avec un "d" majuscule et avec un "a" minuscule alors que, pour être correct, il aurait fallu que ce soit le contraire. Et le pire dans cette histoire, c'est de penser que ce ne sont pas les Américains qui sont les responsables de cette erreur monumentale ! L'erreur vient en effet des Français qui ont réécrit les titres pour l'exploitation française du film (le titre original étant, en effet, The musketeer, littéralement Le mousquetaire) ! Honte sur nous ! Même pas fichus d'écrire correctement le nom d'une célébrité locale. Reste seulement le plaisir d'écouter la musique de David Arnold, compositeur de Casino Royale, qui nous livre ici une bande originale à mi-chemin entre Superman et Robin des Bois Prince des voleurs.

Règle n°2 : Si adaptation de livre tu fais, à respecter l'histoire tu t'engageras.

Le générique nous avait pourtant averti : ce film a été réalisé "d'après l'oeuvre d'Alexandre Dumas". Mais "d'après" selon Peter Hyams, ça doit sans doute vouloir signifier "à des années lumières" ! Résumons l'intrigue du film (ne vous inquiétez pas, il n'y a franchement rien à spoiler tant ce film est prévisible de bout en bout) : C'est l'histoire de d'Artagnan, un jeune gascon (heu, à vrai dire le film ne dit mot sur ses origines donc il serait préférable de dire "un jeune homme") qui monte sur Paris afin de devenir mousquetaire comme son illustre père. Malheureusement, arrivé sur place il apprend que le corps des mousquetaires a été dissout par le cardinal de Richelieu car on les soupçonne d'avoir assassiné l'émissaire du roi d'Espagne. Bien sûr, c'est le cardinal lui-même qui est derrière cette machination, lui et son infâme bras droit Fèbre, car il veut assurer sa prédominance sur le Roi en maintenant une tension permanente entre la France, l'Angleterre et l'Espagne. Du coup notre jeune d'Artagnan part en croisade : il libèrera pratiquement tout seul Tréville des geôles du cardinal, il sauvera à lui seul le Roi et la Reine d'une foule en délire, il escortera tout seul la Reine à un rendez-vous secret avec le Duc de Buckingham et il tuera tout seul le perfide Fèbre qui s'avèrera être le meurtrier de ses parents. Il n'est donc, à aucun moment, question des ferrets de la Reine alors que c'est l'élément central du livre !
Et là vous me dites : "mais où sont les trois mousquetaires ?". Ben ils sont là, mais ils ne servent à rien puisqu'ils passent leur temps à noyer leur ennui dans l'alcool. Par contre, pour critiquer d'Artagnan, là ils sont champions : "Tu n'es qu'un gardien de moutons, retourne garder tes moutons !" entendra-t-on dire de la part d'Athos. Athos bon sang ! Certainement le mousquetaire le plus intéressant de la bande, ne serait-ce que par le fait qu'il a été le mari de Milady. Oh mais suis-je bête, il n'y a pas de Milady dans ce film ! Tout comme il n'y a pas de Constance Bonnacieux qui est ici remplacée par... Francesca Bonnacieux ! Pourquoi Francesca ? Alors là, mystère et boule de gomme. Quant à Rochefort, l'adversaire de d'Artagnan dans le livre, il est présent mais totalement occulté par le terrifiant Fèbre. Ce dernier, d'ailleurs, ne supportant pas la concurrence, finira par tuer ce piètre prétendant au titre de méchant suprême, dans une des séquences les plus incompréhensibles du film.


Même les rapports entre les personnages ont été changés ! Francesca n'est, ainsi, pas la femme de Bonnacieux, mais sa nièce, ce qui lui évite d'avoir une relation adultère avec le fougueux d'Artagnan. Quant à la Reine, si elle va rencontrer secrètement le duc de Buckingham, ce n'est nullement parce qu'elle amoureuse de lui, mais plutôt pour négocier un accord pour éviter la guerre. Ce film serait-il donc le reflet d'une Amérique puritaine, bien propre sur elle ?


On dirait bien que non...


Et ça ce n'est rien, rien comparé... aux combats mâtinés de kung-fu ! Peter Hyams a, en effet décidé de surfer sur la vague de Tigre et dragons et de Matrix, mais insérer de pareils combats dans un film de capes et d'épées, cela choque, forcément. Enfin, je critique, mais nous les Français n'avons pas fait mieux avec un certain Pacte des Loups... Mais au moins, dans ce dernier film, le scénario était en béton armé et les acteurs semblaient beaucoup plus impliqués. Ici, les acteurs sont en roue libre : Tim Roth en fait des tonnes (si vous ne devinez pas que c'est le méchant de l'histoire c'est que vous vous êtes endormis devant votre télévision), Justin Chambers semble complètement amorphe et bête, Catherine Deneuve n'a que 20 lignes pour tout  texte, et Jean-Pierre Castaldi fait du Jean-Pierre Castaldi (quand on pense que c'est lui qui est censé avoir appris le kung-fu à d'Artagnan, cela fait doucement rigoler).

Pour conclure avec cette question, je laisse la parole à Rochefort qui a un idée bien arrêtée sur le style de combat de d'Artagnan.



Règle n°3 : Le montage épileptique, tu éviteras, car grosses bourdes tu commettras.

C'est à se demander qui est le plus fautif : le réalisateur qui n'a pas donné assez de matériau à son monteur ou le monteur qui s'est mélangé les pinceaux ? Toujours utile que d'Artagnan est un film brouillon regorgeant de faux raccords à la pelle. Rien que cette séquence vous donnera une idée de ce que nous avons dû subir pour vous préparer cette critique.




Ne me dites pas que vous avez compris quoi que soit à cet extrait, car moi, j'y ai renoncé depuis longtemps...

Quant aux faux raccords, ils sont tellement nombreux que les énumérer tous reviendrait à vous montrer l'intégralité du film. Je préfère plutôt vous montrer cet extrait où l'on peut voir d'Artagnan grimper à une tour, se faire attaquer par des méchants kamikazes, dégringoler sans aucune raison (c'est lui qui coupe la corde du méchant, pas l'inverse !), perdre son épée au passage, rattraper une corde, remonter avec une épée dans la main (m'enfin !), faire tomber un méchant et réaliser par là même une prouesse mathématique digne de Jean-Claude Van Damme (essayez donc de compter les méchants avant et après que d'Artagnan en fasse tomber un, vous verrez, c'est édifiant !)



Je sais ce que vous allez me dire : "oui, c'est une scène d'action, il y a beaucoup de monde, c'est normal que le monteur se plante". Alors que dites vous de ça :




Non sérieusement, si vous n'avez pas vu le faux raccord, c'est que vous avez des peaux de saucisson devant les yeux ! Allez je vous donne un indice, regardez la tenue vestimentaire de d'Artagnan.


Règle n°4 : Ne pas rater le combat final , tu devras.

Le combat final, aussi spectaculaire que grand-guignolesque, est le parfait résumé de toutes les scènes d'actions présentes dans ce film. Peter Hyams juge, en effet superflu de dissimuler les doublures des acteurs principaux (il a essayé au début en obscurcissant les pièces mais il a fini par jeter l'éponge en milieu de film). C'est notamment visible pour la doublure de Tim Roth qui affiche une barbe beaucoup plus fournie que celle de Tim Roth lui-même ! Paradoxalement, ce combat est le plus jouissif auquel j'ai pu assister depuis bien longtemps. Malheureusement la magie s'est brisée au moment où le méchant s'est fait tuer par d'Artagnan à l'aide d'un ... d'un quoi au fait ? J'ai repassé la scène au moins 15 fois et je ne vois toujours rien dans la main de d'Artagnan qui puisse justifier le bruit d'embrochage que l'on entend dans le film. J'ai tout imaginé : un couteau, une aiguille à tricoter, un coup de poing américain, mais rien ne me satisfait vraiment. Aussi, je profite de cette analyse pour lancer un sondage sur cette mort mystérieuse. Je vous laisse l'extrait pour que vous vous fassiez une opinion.




Conclusion : D'Artagnan est un nanar, un vrai, un comme on les aime. Du n'importe quoi, une histoire sans queue ni tête, des acteurs qui surjouent ou qui ne jouent pas du tout, et une montagne de faux raccords, tout ces éléments justifient amplement son entrée dans le guide du nanar futé. Et aussi incroyable que cela puisse paraître, je vous suggère d'acquérir le dvd de cet authentique chef-d'oeuvre de niaiserie afin que vous puissiez ricaner entre potes (je l'ai trouvé pour ma part à 3 euros).




3 commentaires:

  1. Je pense que d'Artagnan tue Fèbre avec une écharde de bois qu'il a pu trouver sur l'échelle. Le coup de l'écharde en bois dans la carotide est mortel...
    JM

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  2. Moi je pense tout simplement à ... son épée ! (Ou du moins c'est ce que le réalisateur a voulu faire passer même si, une seconde avant de tomber, d'Artagnan n'a rien dans les mains (encore un faux raccord) et qu'il n'a toujours rien dans les mains après avoir retiré l'objet perçant du corps de Fèbre...

    Encore un bon nanard qui passe constamment durant les les fêtes de Noël, et qui fait partie des narcotiques puissants, très utile pour une sieste digeste et revigorante près d'un bon feu de bois.

    Chris22205

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  3. La dague reste planté dans son abdomen

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